Arfeuilles au siècle des Lumières
Si le XVIIIème siècle fut qualifié de « Siècle des Lumières » par les historiens, on ne peut pas dire qu’à Arfeuilles, les lumières aient beaucoup brillé. Le 27 octobre 1713, la Maréchale d’Humières avait vendu ses terres et ses dîmes à Paul Etienne Brunet de Rancy, seigneur d’Evry, né en 1651. Il mourut à Paris en 1717. La famille Brunet était originaire de Beaune (Côte d’Or). Rancy est situé sur la commune de Pommard (arrondissement de Beaune). Evry (Evry-lesChâteaux) est situé dans le canton de BrieComte-Robert, arrondissement de Melun (Seine et Marne). Paul Etienne BRUNET était qualifié de Seigneur de Rancy, Evry, Egrenay, Comps-la-Ville, Vaux-la-Reine, Varennes, Vaucelles etc… Il fut trésorier-général de la maison du Roi en 1686, fermier général des gabelles de France en 1696, receveur général des finances de Flandre et Hainaut, conseiller et secrétaire du Roi en la grande chancellerie en 1701. Son fils Gilles est qualifié de Seigneur de la baronnie de Châtel-Montagne , de Rancy, Evry, Les Bouchaines, la Presle, Montmorillon, SaintClément,… marquis de La Palisse, il fut Conseiller au Parlement de Paris en 1706, maître des requêtes en 1709, intendant d’Auvergne en 1720 et du Bourbonnais en 1723. Il acheta en 1715 la terre et le château de La Palisse, obtint leur érection en marquisat en 1724 et les revendit en 1731 à la famille de Chabannes qui les avait autrefois possédés, et qui les possède toujours. Il acheta en 1718 à Paul et Jacques de Valadoux les dernières terres que ces derniers possédaient encore à Montmorillon. Les trois fiefs de Montmorillon, Châtel-Montagne et Arfeuilles étaient réunis dans la même main. Ainsi, contrairement à la tradition orale, reprise par certains historiens, tradition qui veut qu’Arfeuilles dépende de Montmorillon, ce sont les seigneurs de Châtel-MontagneArfeuilles qui reprennent, à partir de 1590, morceau par morceau, les terres et les dîmes
de Montmorillon. Il est vrai que les terres des seigneurs de Montmorillon approchaient de très près le bourg d’Arfeuilles (Croix des Chabannes) et que ces terres étaient situées sur la paroisse d’Arfeuilles. Alors que les seigneurs successifs de ChâtelMontagne-Arfeuilles vivant à Vichy, Paris ou Moulins ne laissèrent que peu de souvenirs en mal comme en bien, les derniers Montmorillon (Guillard et Valadoux) furent de bien tristes sires dont les exactions marquèrent profondément les mémoires. Si le vieux château fut pendant près de deux siècles le lieu de collecte des impôts en nature (dîme), il le fut aussi bien progressivement pour les terres de Montmorillon, comme il l’était déjà pour les terres d’Arfeuilles. Le fils de Gilles naquit en 1725 et fut prénommé Joseph Moulins. Il conserva les titres et charges de son père. Il vivait encore en 1792 et résidait à Moulins. Son fils, Antoine Louis Gilles, colonel du régiment des chasseurs à cheval des Cévennes, émigra. Il mourut en 1815. Ses héritiers vendirent en 1826 tout ce qu’ils possédaient encore à Montmorillon. Les acheteurs des parcelles de terre avaient le droit de prendre les pierres du château pour construire leurs maisons et granges. Peu de réalisations marquèrent cette période. La population augmentait et les 112 feux étaient atteints en 1686.
Au début de ce siècle, vint s’installer à Arfeuilles, une famille inattendue, celle des comtes Dandolo. Cette famille, qui avait fourni au XIIème siècle plusieurs Doges illustres à la république de Venise, vit un de ses descendants, Marc, s’installer à Arfeuilles. On ne sait ni comment ni pourquoi ce capitaine au service du Roi se plut dans notre pays et s’y installa avec les siens. Ils logeaient dans la maison qui actuellement est à l’angle du passage Voltaire et de la place Kléber. Ils y restèrent pendant tout le XVIIIème siècle. Les Brunet d’Evry laissèrent comme trace à Arfeuilles les « Grands Moulins » qu’ils firent construire, et qui existent toujours, en état de fonctionnement, mais ne travaillent plus depuis longtemps. Un des impôts les plus impopulaires à cette époque était celui sur le sel : la gabelle, d’autant plus impopulaire qu’il existait deux régimes de gabelle qui se partageaient le territoire : la petite qui payait le minimum et dont le Forez faisait partie et la grande dont le Bourbonnais était affligé. Le sel valait en gros cinq fois plus cher en grande gabelle qu’il ne le valait en petite. La limite entre les deux zones passait dans le bourg actuel, rue de la République au niveau de la bascule publique. Le corps de garde et de contrôle logeait dans la maison qui porte une plaque « La Gabelle », et une date : 1721. La contrebande était importante et les « Gabelous » exerçaient une répression particulièrement odieuse. Mandrin séjourna en bourbonnais en 1754 et en particulier dans notre région. Il ne passa pas à Arfeuilles, mais, au Breuil. Le dimanche 22 décembre 1754, à la sortie de la messe, au cours d’une rixe, il tua cinq employés de la gabelle qui voulurent s’opposer à son passage.
C’est vers 1750 que s’installa à Arfeuilles un certain Pierre Martin qui avait acquis quelques terres dans la région. En 1739, il avait acquis celle du Gard, près de Molles. Il prit le nom de Martin du Gard pour se distinguer des autres Martin. Son fils, Jacques Martin du Gard, né en 1733, devint receveur (des impôts) pour la baronnie de Châtel-MontagneArfeuilles. En 1771-72, il acquit différents biens, maisons et jardins, dont il fit sa maison d’habitation. Cette maison devait par la suite devenir petit séminaire, école libre et enfin gîte rural. Il fut maire d’Arfeuilles en 1790, 1793, 1800, Président de l’administration cantonale, membre du Conseil départemental de l’Allier, conseiller général. Il mourut à Arfeuilles en 1810. Il avait 12 enfants et parmi sa descendance, on compte Maurice Martin du Gard, fondateur des « Nouvelles littéraires » et Roger Martin du Gard, auteur de « Jean Barrois » et de « Les Thibault », prix Nobel de littérature en 1937.